Les actions de groupes
La thĂ©orie des actions de groupes joue un rĂ´le crucial en mathĂ©matiques, ouvrant la porte Ă une multitude d’applications variĂ©es.
Le sujet est si central qu’une leçon lui est spĂ©cifiquement consacrĂ©e :
Leçon 101: « Groupe opérant sur un ensemble : exemples et applications ».
Dans cet article, nous vous proposons des éléments clés pour élaborer le plan de cette leçon.
Généralités sur les actions de groupe
Pour saisir ce que signifie une action de groupe, il est essentiel de commencer par comprendre la notion de groupe.
Un groupe est la donnĂ©e d’un ensemble G et d’une loi composition interne vĂ©rifiant des axiomes connus.
Autrement dit on peut composer deux éléments de G entre eux.
L’exemple fondamentale de loi, est la composition de fonctions sur un ensemble.
L’objectif de la thĂ©orie des actions de groupe est d‘Ă©tablir une correspondance entre un groupe abstrait et le groupe des bijections d’un ensemble.
DĂ©finition d’une action de groupe:
Soit G un groupe et X un ensemble.
On note \mathrm{Bij}(X) le groupe des bijections sur X.
Une action du groupe G sur X est la donnĂ©e d’un morphisme de groupe
\rho : G \longrightarrow \mathrm{Bij}(X)
Les exemples standards d’actions de groupe sont les suivants:
- L’action par translation d’un groupe (G, \times) sur lui mĂŞme:
g \in G, x \in X:=G, \quad \rho(g) \cdot x = g \times x. - L’action par conjugaison d’un groupe (G, \times) sur lui mĂŞme:
g \in G, x \in X:=G, \quad \rho(g) \cdot x = g \times x \times g^{-1}. - L’action naturelle du groupe symĂ©trique d’ordre n sur l’ensemble \{ 1, \dots, n\}.
- L’action naturelle du groupe linĂ©aire \mathrm{GL}_n(\mathrm{R}) sur l’espace-vectoriel \mathrm{R}^n.
Action fidèle
DĂ©finition d’une action fidèle:
Soit \rho : G \longrightarrow \mathrm{Bij}(X) une action de groupe.
L’action est dite fidèle si \rho est injectif.
Si \rho est une action fidèle alors \rho induit un isormorphisme de G sur un sous groupe de \mathrm{Bij}(X).
Toute action quelconque se ramène à une action fidèle, en quotientant par le noyau.
C’est-Ă -dire qu’on peut dĂ©finir \rho' : G/\mathrm{ker}(\rho) \longrightarrow \mathrm{Bij}(X) une reprĂ©sentation fidèle par:
\rho'(g \mod \mathrm{ker}(\rho)) \cdot x := \rho(g) \cdot x.
Exemples:
- L’action de G par translation sur lui mĂŞme est fidèle.
On peut en dĂ©duire le thĂ©orème de Cayley: G est isomorphe Ă un sous-groupe d’un groupe symĂ©trique. - L’action par conjugaison d’un groupe G sur lui mĂŞme a pour noyau son centre \mathrm{Z}(G).
L’image s’appelle les automorphismes intĂ©rieurs.
Le groupe des automorphisme intĂ©rieur est alors isomorphes Ă G/\mathrm{Z}(G) - L’action naturelle du groupe linĂ©aire \mathrm{GL}_n(\mathrm{R}) sur l’espace projectif \mathrm{P}(\mathrm{R}^n) (ensemble des droites de \mathrm{R}^n) a pour noyau les homothĂ©ties linĂ©aires.
Le quotient s’appelle de groupe projectif linĂ©aire \mathrm{PGL}_n(\mathrm{R}).
Orbite et stabilisateur
DĂ©finitions:
Soit \rho : G \longrightarrow \mathrm{Bij}(X) une action de groupe.
Soit x \in X.
L’orbite de x est l’ensemble le sous-ensemble de X:
\mathrm{Orb}(x) := \{ \rho(g) \cdot x , \quad g \in G \}.
Le stabilisateur de x est sous-groupe:
\mathrm{Stab}(x) := \{ g \in G ~|~ \rho(g) \cdot x = x \}.
Exemples:
- On considère l’action du groupe des rotations \mathrm{SO}_2(\mathbb{R}) sur le plan \mathbb{R}^2.
L’orbite d’un point x est le cercle centrĂ© Ă l’origine de rayon \|x\|_2.
C’est l’analogie avec l’orbite d’une planète. - On considère l’action de \mathrm{GL}_n(\mathrm{R}) par conjugaison sur lui-mĂŞme.
L’orbite d’une matrice x \in \mathrm{GL}_n(\mathrm{R}) est l’ensemble des matrices conjuguĂ©s Ă x.
Son stabilisateur est le sous-groupe des matrices qui commutent avec x.
Une orbite s’interprète aussi comme classe d’Ă©quivalence pour la relation d’Ă©quivalence:
x \sim y \Longleftrightarrow \exists g \in G, \quad x = \rho(g) \cdot y.
On peut donc en dĂ©duire que X est l’union disjointe des orbites.
Dans le cas oĂą X est fini, on obtient l’Ă©quation des classes:
\mathrm{Card}(X) = \sum_{i \in I} \mathrm{Card}(\mathrm{Orb}(x_i)),
où x_i parcourt un ensemble de représentants des orbites.
Le stabilisateur et l’orbite sont reliĂ©s par la proposition suivante.
Proposition:
Soit \rho : G \longrightarrow \mathrm{Bij}(X) une action de groupe.
Soit x.
L’application
G \longrightarrow X, \quad g \longmapsto \rho(g) \cdot x.
induit une bijection entre G / \mathrm{Stab}(x) et \mathrm{Orb}(x).
Corrolaire – La formule des classes:
Si G est un groupe fini, alors:
\mathrm{Card}(G) / \mathrm{Card}(\mathrm{Stab}(x)) = \mathrm{Card}(\mathrm{Orb}(x))
La formule de Burnside
La formule de Burnside est un thĂ©orème de dĂ©nombrement qui sert le plus souvent Ă calculer le nombre d’orbites d’une action de groupe.
DĂ©finition – Fixateur:
Soit \rho : G \longrightarrow \mathrm{Bij}(X) une action de groupe.
Soit g \in G.
Le fixateur de g est le sous-ensemble:
\mathrm{Fix}(g) = \{ x \in X ~|~ \rho(g) \cdot x = x \}.
ThĂ©orème – Formule de Burneside:
Soit \rho : G \longrightarrow \mathrm{Bij}(X) une action de groupe.
On suppose que G et X sont des ensembles finis.
On note N le nombre d’orbites distinctes.
Alors on a:
N \times \mathrm{Card}(G) = \sum_{g \in G} \mathrm{Fix}(g).
Applications sur les groupes finis
Donnons quelques thĂ©orèmes importants sur les groupes finis qui se dĂ©montrent Ă l’aide des actions de groupes.
Théorème de Cauchy:
Théorème de Cauchy:
Soit G un groupe fini.
Soit p un nombre premier divisant G.
Alors G admet un Ă©lĂ©ment d’ordre p.
Preuve:
On dĂ©finit l’ensemble:
X := \{ (g_1, g_2, \dots, g_p) \in G^p ~|~ g_1 \times g_2 \dots \times g_p = 1_G \}.
On fait agir le groupe \mathbb{Z}/p \mathbb{Z} sur X en faisant tourner les éléments: pour x = (g_1, g_2, \dots, g_p) et (k \mod p) \in \mathbb{Z}/p \mathbb{Z}:
\rho(k \mod p) \cdot x = (g_{1 +k \mod p}, g_{2 +k \mod p}, \dots, g_{p +k \mod p})
On remarque les choses suivantes:
- Pour g \in G tel que g^p = 1_G, l’Ă©lĂ©ment (g, g,g, \dots g) est un Ă©lĂ©ment de X et son orbite est de cardinal 1.
- RĂ©ciproquement tout Ă©lĂ©ment de X d’orbite 1 est de ce type.
On cherche donc Ă montrer qu’il existe des orbites de cardinal 1, autre que (1_G, 1_G, \dots, 1_G).
On note N \geq 1 le nombre d’orbites de cardinal 1.
Le cardinal de X vaut \mathrm{Card}(G)^{p-1}.
Comme p divise \mathrm{Card}(G), on a:
\mathrm{Card}(X) \equiv 0 \mod p.
D’après l’Ă©quation des classes:
\mathrm{Card}(X) = \sum_{i \in I} \mathrm{Card}( \mathcal{O_i} ),
où \mathcal{O_i} désigne les orbites disjointes.
Pour tout i \in I , le cardinal \mathrm{Card}( \mathcal{O_i} ) divise \mathrm{Card}(\mathbb{Z}/p \mathbb{Z}).
Donc \mathrm{Card}( \mathcal{O_i} ) vaut 1 ou p.
On a donc:
\mathrm{Card}(X) \equiv N \mod p.
Or \mathrm{Card}(X) \equiv 0 \mod p et N \geq 1.
Donc N \geq p. CQFD
Centre d’un p-groupe
Théorème:
Soit p un nombre premier.
Soit G un p-groupe non-réduit à 1.
Alors le centre de G est non-réduit à 1.
Preuve:
On note X := G et \rho l’action de G sur X par conjugaison.
On note Z le centre de G.
Soit \mathcal{O} une orbite.
Le cardinal de \mathcal{O} divise \mathrm{Card}(G).
Comme \mathrm{Card}(G) est une puissance de p:
- soit \mathrm{Card}(\mathcal{O}) = 1.
- soit \mathrm{Card}(\mathcal{O}) \equiv 0 \mod p.
D’autre part \mathcal{O} est de cardinal 1 si et seulement si c’est l’orbite d’un Ă©lĂ©ment du centre.
D’après l’Ă©quation des classes:
\mathrm{Card}(X) = \sum_{i \in I} \mathrm{Card}( \mathcal{O_i} ),
où \mathcal{O_i} désigne les orbites disjointes.
Il y a \mathrm{Card}(Z) orbites de cardinal 1 et tous les autres orbites sont de cardinal congrue Ă (0 \mod p).
Donc:
\mathrm{Card}(Z) \equiv \mathrm{Card}(X) \mod p \equiv 0 \mod p.
Donc Z est non rĂ©duit Ă l’Ă©lĂ©ment neutre. CQFD
Si cet article t’as aidĂ© ou si tu as des questions, n’hĂ©site pas Ă Ă©crire en commentaire ! đź‘Ť
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